Le 8 Mars de chaque année, le monde entier célèbre la femme avec la Journée Internationale de la Femme. La Martinique prénommée autrefois par les Arawaks « Matinino ou Madinina » qui signifie l'île aux femmes était une île qu'ils définissaient comme peuplée exclusivement de femmes guerrières. AZ Martinique vous fait découvrir à travers un dossier l'histoire de la femme martiniquaise, de la femme Arawak à la femme créole contemporaine, devenue pilier de la famille martiniquaise.
La femme en Martinique lors de la période pré-colombienne
La femme Arawak
Les Arawaks sont des Amérindiens originaires de l'Amazonie qui ont vécu dans l'archipel caribéen du 4ème siècle av. J.-C. au 15ème siècle après J.-C.. Le nom « Arawak » ne désigne pas un peuple à proprement parlé mais une famille linguistique à laquelle se rattache de nombreuses populations amérindiennes d'Amazonie dont les Kali'na et les Caraïbes. D'après la poterie retrouvée, ils vivaient essentiellement de l'agriculture notamment le manioc qui était la base de tous les Amérindiens de la Caraïbe, la pêche et la cueillette.
Une société de pêcheurs
En Martinique, ils vivaient près des cours d'eau (mer ou rivière) généralement sur la côte atlantique de l'île, toute la côte Nord-Est, de la presqu'île de la Caravelle jusqu'à l'embouchure de la rivière Capot qui descend du Morne Rouge, c'est-à-dire sur les contreforts de la Montagne Pelée. De là, ils s'installaient sur les faibles hauteurs dominant la plage. Ils n'aimaient pas les eaux calmes de la Caraïbe mais appréciaient la fertilité du sol volcanique.
Ce choix de location était dû au fait que les Arawaks étaient avant tout des pêcheurs. Ils seraient même les inventeurs de la pisciculture qu'ils pratiquaient avec l'aide des marées (marée basse : capture et élevage, marée haute : prélèvement si besoin). Leurs villages étaient si nombreux que la Martinique était considérée comme la capitale des Arawaks des Antilles. Les Arawaks étaient également des chasseurs mais de petits animaux (agoutis, iguanes, tortues, lamantins).
Les femmes s'occupaient généralement des tâches domestiques, de la poterie et des travaux agricoles. Elles élaboraient des récipients en terre cuite qui étaient utilisés quotidiennement quand ils étaient de facture grossière. Les poteries cérémoniales étaient finement réalisées et parfois décorées. De nombreux vestiges de cette période ont été retrouvés et sont actuellement exposés au Musée d'Archéologie et de Préhistoire à Fort-de-France.
L'importance de la poterie
La poterie n'était pas qu'un art c'était aussi une expression des croyances. Elles le faisaient à travers la décoration de leurs poteries. En réalité, la poterie arawak était un véritable art religieux. Les décorations étaient faites soit par incision, soit en les peignant ou encore en y ajoutant de petites figurines modelées appelées « adornos ». Outre la poterie, les femmes s'occupaient du travail de la terre qui était rudimentaire à l'époque. Elles se contentaient de défricher les bois et pratiquaient la culture sur brûlis. Les outils de l'époque étaient loin d'être sophistiqués et n'étaient que de simples bâtons de bois pointus appelés « coas » qui leur servaient pour fouiller la terre.
L’alimentation
Concernant la cuisine ou préparation des aliments, c'était également une tâche qui incombait aux femmes. L'aliment de base était le manioc. Le tubercule était pelé à l'aide d'outils de pierre ou de coquillages, les racines étaient ensuite râpées sur une planche hérissée de pierres ou sur un morceau de corail plat.
Le suc du manioc était alors extrait et de là, la farine obtenue était tamisée puis cuite sur de grands plateaux circulaires en céramique appelé « platine ». Cette farine donnait une sorte de galette : la cassave. Le jus de manioc, une fois fermenté, donnait un alcool de 3 a 5° qui portait le nom de "ouicou".
Le ouicou était consommé en grande quantité lors des cérémonies religieuses célébrées par les shamans. Les Arawaks récoltaient aussi des fruits, des baies, des légumes, plantes sauvages et du bois. Ils avaient diverses utilisations :
- nourriture
- peinture corporelle et protection contre les piqûres d'insectes pour le roucou (colorant naturel rouge)
- fabrication du feu (bois, brindilles, herbes sèche)
- soins médicaux concernant les plantes aux propriétés curatives.
Le travail du coton
Le coton était également récolté en grande quantité par les femmes Arawak. Elles en faisaient du fil à l'aide de fusaïoles fabriquées en terre cuite et emmanchées au bout d'une tige en bois. Ces fils, une fois tressés étaient transformés en cordages puis en cordes. Le coton était donc une matière première indispensable à la fabrication du tissu, des filets de pêche, des hamacs et des cordes.
Habitat et mode de vie
Ils vivaient soit dans des cases ou huttes en bois dénommées « bohios » par famille soit de façon commune dans des carbets. Les cases regroupées formaient un village. Un village était composé d'environ 1000 habitants avec environ 50 huttes familiales. Les plus gros avaient plus de 5000 habitants.
Les bohios étaient construites avec l'aide de poteaux de bois ou de roseau, et couvertes de chaume. Ils sont disposés en rond autour d'une place centrale. Ces huttes étaient parfois construites sur pilotis, sans doute pour éviter l'humidité ou peut-être pour se préserver des serpents, le trigonocéphale.
Le carbet était une maison commune de forme ovale où vivaient plusieurs personnes avec leurs hamacs en coton. Il était situé au centre du village et pouvait mesurer 20m de long et 8m de large. Les deux types d'habitations nécessitaient les mêmes matériaux à savoir le bois, le feuillage, et les roseaux. Une porte basse faisait figure d'entrée. Les pirogues qui servaient aux nombreux déplacements inter-îles, commercer ou à la pêche étaient fabriquées par les hommes, plus ou moins jeunes.
Organisation de la société
La société Arawak se différenciait de la société Caraïbe car elle était réputée pacifique alors que la Caraïbe était guerrière. Elle était très organisée et matriarcale, organisée autour de la mère. La filiation était transmise par les femmes. Quant au pouvoir, il n'était pas exclusivement masculin car des femmes pouvaient y accéder mais il était prioritairement masculin. Les chefs au pouvoir étaient appelés les « caciques » et il y a eu des femmes caciques. Le pouvoir se transmettait ensuite au fils aîné de sœur aînée.
La polygamie était pratiquée et la première femme avait le pouvoir sur toutes les autres épouses. Les fêtes religieuses étaient très nombreuses étant donné que les Arawaks étaient animistes. Selon eux, les animaux ont une âme. Ils honoraient leurs dieux pour leur pouvoir fécondant. Lors des cérémonies religieuses, ils dansaient et apportaient des offrandes à leurs dieux. Ils entraient en contact avec eux grâce aux « Zémis », qui étaient des petites idoles de différentes formes. Chaque famille avait son Zémi.
Les populations Arawak vivaient nues. Les femmes portaient un cache-sexe en coton une fois mariées (cf voir photo ci-dessus) , les hommes parfois aussi. Il a été rapporté (par Pierre Martyr d'Anghiera) que Christophe Colomb lors de son deuxième voyage vers la Caraïbe aurait rencontré des Arawaks à Saint-Domingue qui lui aurait parlé d'une île plus à l'Est, peuplée exclusivement de femmes et qu'ils appelaient Matinino, nom qu'il traduit dans son journal par isla de las mujeres, « l'île aux femmes ».
Cependant, l'île n'était pas peuplée exclusivement de femmes d'après la description qu'il en a fait dans son journal.